Bien avant que le gouvernement ne se mette à parler couramment la langue covidienne, il avait été question de la marque de l’État. Mais qui donc a réalisé ce beau travail sur la marque tricolore ? On donne notre langue au « PM » !
Il y a une éternité — était-ce en janvier ou février dernier ? — le gouvernement avait pris soin de communiquer sur l’évolution de son « identité de marque » pour annoncer ce changement de charte graphique et de vocabulaire de marque.
Amoureux du design de marque et de la typographie, nous n’allons surtout pas reprocher à ceux qui nous gouvernent de s’appuyer sur nos métiers, pour rajeunir son image et lui donner plus d’éclat !
Une charte épurée et très bien pensée
Ce travail d’une grande qualité graphique mérite d’être salué, même si le sens d’une telle démarche pour paraître accessoire au profane ou d’une manière plus large, à nos concitoyens. Car ce « lifting » de la marque républicaine est plutôt réussi, 20 ans après le lancement du fameux « bloc Marianne » et avec une nouvelle charte graphique très complète « qui s’inscrit dans le projet de refonte des fondamentaux de la communication de l’État. »
Cette nouvelle manière de présenter les services de l’État s’appuie sur une réflexion pertinente autour de la visibilité et l’identification, avec une approche plus épurée, plus lisible et par conséquent bienvenue, pour « permettre aux citoyens d’identifier, de comprendre et de s’approprier l’action gouvernementale et plus généralement l’action publique. »
Ou comment apporter une plus grande cohérence à l’ensemble des outils de communication de l’État, de ses ministères et ses institutions sous tutelle, de redonner toute sa place à l’émetteur, tout en normalisant la dimension co-branding avec des règles claires.
Logo mon beau logo !
Comme chacun sait, un logo n’est pas « qu’un croquis sur un coin de table » comme le laissent parfois penser certains médias en s’offusquant d’un buget « énorme » et souvent sorti de son contexte.
Il s’agit d’une approche rigoureuse, créative et réfléchie sur la marque et son patrimoine, la typographie, les couleurs, les supports, les nombreuses déclinaisons, ses multiples utilisateurs… Bref, un long et minutieux travail que résume bien le Brand Book qui accompagne la sortie d’une nouvelle identité visuelle.
Un petit coup d’œil à une charte graphique bien construite — et celle de l’État est un modèle du genre ! — permet de se faire une idée des jours et des nuits que cache « un simple concept de logo ». 😉
Si l’on considère que la marque est de plus en plus souvent portée à l’actif de l’entreprise — et à juste titre car celle-ci est l’étendard derrière lequel le business se construit ! — on comprend que ce « simple logo » devient un instrument stratégique au service de la conquête et de la fidélisation client.
Pour une entreprise, comme pour une institution publique, même si elle ne « vend » rien. En l’espèce, la nouvelle charte du Gouvernement a une grande et belle ambition qu’il résume ainsi au sujet de sa marque : « Là où l’État est présent, agit, finance, sa présence doit être clairement identifiée. »
Curieusement, ce travail n’est pas signé…
Qu’il s’agisse du site du gouvernement qui présente cette nouvelle identité ici en donnant libre accès à l’ensemble de la charte en ligne ou des communiqués et dossiers de presse, jamais n’est évoqué « l’artisan » qui se cache derrière ce bel ouvrage.
On peut être surpris et regretter que dans tous les articles qui en font la promotion, jamais il n’ait fait mention de l’agence, du typographe, du directeur artistique ou du graphiste derrière cet important travail sur la charte graphique officielle, comme on citerait ou évoquerait l’architecte derrière un nouvel édifice.
Scoop !
S’il fallait retrouver le typo(graphiste) inconnu, c’est chose faite ! L’école Estienne a fini par publier — en plein confinement ! —un court éloge de Mathieu Réguer, talentueux typographe à l’origine de la toute nouvelle fonte de caractères « Marianne ». Bravo.
Quant à l’agence ou le studio consulté(e) par les services communication du gouvernement en 2019, pour réaliser ce travail sur la marque et sir la charte, histoire de rendre à César ce qui appartient à César. Celui-ci était jusqu’à ce jour un mystère, que nous avons bien sûr découvert. Laissons à cette agence la primeur de l’annonce, puisque même le gouvernement tait son nom.
Puisse dans cette belle aventure le gouvernement ne plus omettre d’indiquer avec qui il travaille. Un architecte signe un bâtiment même public. Laissons aux designers ce plaisir-là, aussi, même si leur nom figure en tout petit en quatrième de couverture.
Car en propriété intellectuelle comme en droit des marques, seuls les droits sont « cédés ». La propriété, elle, reste inaliénable !